Vilanova Argile, le dernier whisky tourbé de chez Castan est sorti en mars. Castan, c’est une histoire de famille. Se distinguant à l’origine par son alambic ambulant en cuivre rouge, la maison est désormais bien installée dans son domaine de Villeneuve sur Vère dans le Tarn, où elle produit eaux-de-vie, vins, gins et whiskies. Lors de son récent passage à Paris, Whiskymag.fr à croisé Sébastien Castan, le fondateur de la distillerie.
Whiskymag.fr : Pour commencer, pouvez-vous vous me parler de l’histoire Castan ?
Sébastien Castan : Je suis agriculteur, j’ai toujours été agriculteur avec de la céréale et de la vigne en appellation Gaillac. Mon père et mon grand-père étaient bouilleurs ambulants. En 2004 mon père a arrêté, j’ai alors repris ses alambics. J’ai commencé en ambulant puis, avec ma femme Céline, nous nous sommes vite sédentarisés en créant nos propres spiritueux, à commencer par les alcools de fruits. En 2010, nous nous sommes tournés vers le whisky. L’idée étant de faire un whisky allant de notre production de céréales jusqu’au vieillissement.
Wmag.fr : Qu’est-ce qui fait la spécificité de vos spiritueux ?
S C : Premièrement, vous l’entendez à mon accent, nous sommes dans le sud. Et nos céréales du sud sont assez rustiques, avec de l’orge de printemps. Ensuite, nous sommes en agriculture biologique depuis 2009, et pour les céréales en 2016, par ailleurs, nous avons notre propre source d’eau.
Mais notre grande particularité, ce sont nos alambics ambulants, que nous utilisons même pour nos whiskies. Ils sont réchauffés à la vapeur, c’est-à-dire que nous avons une injection de vapeur dans le distillat, ce qui est très rare lors de la fabrication de whisky.
Wmag.fr : Ils sont magnifiques d’ailleurs !
S C : Nous avions demandé un devis pour du neuf, mais cela ne correspondait pas à ce que l’on voulait, et les clients aiment ces alambics… Nous les avons donc gardés. Ce qui est une bonne chose, parce qu’avec le monde qu’il y a dans les whiskies aujourd’hui, il faut se démarquer ! De plus, la chauffe très importante de la vapeur amène un côté « gras » dans les whiskies. C’est comme chauffer un légume à la vapeur. Il y a un côté onctueux. Il n’y a pas de sécheresse au résultat.
Wmag.fr : Sont-ce votre père et votre grand père qui vous ont appris à distiller ?
S C : Oui. J’ai d’abord distillé de la poire et de la prune d’Agen. Cependant, je n’étais pas producteur de fruits, j’étais donc tributaire d’autres. Alors que là, pour le whisky, je produits mon orge. Pour l’orge, j’ai dû m’adapter, mais c’est assez similaire. Tout est fait chez moi. Le maltage est la seule partie que j’externalise. Mais je brasse, je fermente, je distille, je mets en fût. Tout est fait sur le site. Le premier bâtiment date de 2007 et la suite avec les alambics et unité de brassage en 2019 pour doubler la production, avec une unité de brassage de 30 hectolitres.
Wmag.fr : Votre dernier né est un whisky tourbé…
S C : Notre dernière nouveauté whisky est sortie fin mars et s’appelle Argile. C’est un tourbé, vieillit en fût de vin rouge. D’ailleurs, l’une de nos spécificités est que 90% de nos whiskies sont vieillis en fûts de vins. Ce n’est pas ce que l’on appelle des « Finish », puisque c’est un vieillissement exclusivement en fût de vin. Nous avons deux whiskies tourbés et trois whiskies dit « classiques ».
Pour les classiques, les tonneaux vont faire la différence ! Le Roja est vieilli en fûts de vin rouge, le Berbie en fûts de vin liquoreux (Monbazillac, Loupiac), le Gost quant à lui est vieilli en fûts de bourgogne et de vins sec.
"Les produits se régionalisent énormément,..., les gens veulent des produits avec une identité."
Wmag.fr : Et à propos du gin ?
S C : Nous en distillons depuis cinq ans. C’est la tendance, de plus, c’est un spiritueux qui ne nécessite pas de stockage. Je voulais faire un gin avec le maximum de baies ramassées chez moi. On y utilise quatre botaniques : baie de genièvre, baie d’églantier, menthe sauvage et une pointe de coriandre. On procède ensuite par infusion à chaud.
Wmag.fr : Nous sommes donc sur des produits de terroir avec une histoire familiale…
S C : Rien que le nom Villanova ! C’est le nom de mon village en Occitan. Gost veut dire goût en occitan, et Roja veut dire rouge. On est vraiment très terroir.
Wmag.fr :Sentez-vous que le marché est plus demandeur de ce point de vue ?
S C : Les produits se régionalisent énormément. Et cela s’est encore accentué avec le COVID. Les gens veulent tout voir. De la graine, jusqu’au produit final. C’est ce qui fait que les gens nous visitent de plus en plus. Le produit n’est pas opaque. Les gens veulent des produits avec une identité. Ils viennent en Occitanie et veulent repartir avec un produit d’Occitannie…
Wmag.fr : Pour ce qui est des vieillissements, avez-vous des pistes pour le futur ?
S C : Oui, mais la difficulté aujourd’hui est de trouver des tonneaux. Après les vieillissements en fûts de vin français, je commence les fûts de vins étrangers comme le Xérès. Mais j’aimerais tenter des vieillissements avec des fûts d’alcools français et notamment des fûts de rhum français des Antilles. Mais les tarifs pour le transport sont pour le moment exorbitants.
Wmag.fr : Et pour la tourbe ?
S C : Les malteries me fournissent. Il s’agit parfois de tourbe écossaise ou allemande, le Brexit ayant rendu l’obtention de matériaux écossais plus compliqué. Cette année, j’ai débuté des distillations avec des malts fumés au bois de hêtre, parce que je redoute des problèmes futurs dans l‘obtention de la tourbe. Pour le moment le distillat sent très bon, on sent bien le fumé. Nous le goûterons dans six mois. Et nous serons au Whisky Live avec une nouveauté !
Par François de Guillebon
Commentaire
Aucun commentaire