Quand on plonge sans gilet de sauvetage dans l’univers du whisky (et des spiritueux en général), on a vite l’impression de parler en langage SMS, tant les producteurs et les amateurs s’expriment par raccourcis. Voici donc les équivalents des LOL, MDR ou autres TKT livrés bruts de fût pour « avoir la carte » dans l’empire du malt.
ABV
Alcohol by volume, en français TAV (titre alcoométrique volumique), aka (also known as) taux d’alcool exprimé en pourcentage, aka plus communément : le degré d’alcool. Soit la quantité d’alcool présente dans le volume total de liquide plongé dans la bouteille – le reste étant de l’eau et un epsilon de molécules aromatiques. Pour le whisky, ce taux ne saurait descendre sous les 40%, du moins en Europe.
ASB
American Standard Barrel. Plus connu sous nos latitudes sous le nom de « fût de bourbon », il contient 200 l ou un peu moins, et se taille presque exclusivement dans le chêne blanc américain (bien que ce ne soit pas une obligation). Les producteurs français, habitués aux tonneaux de vin (220-225 l pour la grande majorité) et aux barriques de cognac (350 l) ou d’armagnac (400-420 l) les baptisent parfois « petits fûts ». Une « finition en petits fûts » ? Un finish en fût de bourbon, en plus chic.
BBR
Berry Bros & Rudd, vénérable maison de négoce londonienne, la plus ancienne du Royaume uni.
DHG
Domaine des Hautes-Glaces. Seule distillerie française suffisamment culte pour se faire héler par ses initiales, surtout auprès de malt lovers qui préfèrent réduire à 3 syllabes et économiser leur salive pour faire glisser en bouche les fines gnôles.
DTC
Direct to consumer, sauf si on vous demande où. La vente « du producteur au consommateur » est un enjeu crucial aux USA (surtout depuis la pandémie), où chaque Etat possède sa propre législation en la matière.
Ex-BB
Ce griffonnement sur les étiquettes des flasques de blender ne signifie pas que le whisky ne rentre plus dans sa layette, mais qu’il a vieilli en anciens fûts de bourbon en version télégraphique.
GMP
Gordon & MacPhail, célébrissime maison de négoce écossaise.
HP
Highland Park, sauf si vous bossez dans l’informatique.
IB
Independent bottling (embouteillage indépendant), par opposition aux embouteillages officiels émis par les distilleries elles-mêmes. Ce sont donc des flacons proposés par les maisons de négoce, qui achètent des distillats ou des whiskies qu’elles élèvent ou dont elles poursuivent le vieillissement selon leurs propres méthodes. Certaines distilleries de l’ombre, dont la production est utilisée avant tout pour créer des blends, n’existent aux yeux des amateurs que par ces IB – Mannochmore, Inchgower, Dailuaine, Teaninich, Glentauchers…
IG
Indication géographique (GI, in english). Appellation mettant en valeur une région de production qui détermine les qualités d’un produit originaire de ce lieu, suivant un cahier des charges précis. Le whisky possède 4 IG enregistrées auprès de l’Union européenne : le scotch whisky, le whisky irlandais, le whisky alsacien et le whisky breton. Celle qui définira un jour le whisky français est à l’étude.
LPA ou LAP
Litres of pure alcohol en anglais, litres d’alcool pur en français. Une unité théorique (l’alcool pur n’existe pas) utilisée pour mesurer la production d’une distillerie ou convertir le contenu des fûts afin de faciliter les échanges. A noter qu’en France les producteurs ont tendance à communiquer en HLAP (hectolitres d’alcool pur). Ajoutez 2 zéros pour faire la soudure.
NAS
No Age Statement. Autrement dit un whisky dont le compte d’âge ne figure pas sur l’étiquette – les équipes marketing auront donc phosphoré pour lui trouver un nom, sauf s’il s’agit d’une jeune distillerie, auquel cas il s’appellera The First Batch, First Release ou Inaugural Release, ou d’un single malt d’Islay, qui piochera de préférence un patronyme qui s’éternue dans la géographie locale. Selon la loi, un NAS a au moins 3 ans et, en Ecosse, rarement davantage. Mais en France, où les indications d’âge sont par tradition plus floues (cf le cognac et ses VS, VSOP ou XO), certains jus de distilleries pionnières jonglent avec les 6 à 8 ans.
NDP
Non-distiller producer, soit littéralement « producteur non distillateur ». Il s’agit donc d’une marque ou d’un assembleur-affineur qui achète à des tiers des jus qu’il/elle embouteille, parfois assemble et/ou affine, sous son nom.
PC
(Prononcer Pissi) Port Charlotte. Sauf si vous bossez dans l’informatique.
OB
Official bottling (voir IB).
PE
(Prononcer pi-hi.) Port Ellen. Sauf si vous pointez à Paul Emploi.
Ppm
Parties par million, unité de mesure utilisée dans le whisky pour donner une idée de l’intensité phénolique du malt, autrement dit sa puissance en tourbe. Exemples : sur Islay, Bowmore utilise une orge tourbée à 25ppm, Lagavulin et Caol Ila à 35 ppm, Ardbeg et Laphroaig à 50 ppm environ, Octomore défonçant régulièrement le mur du son à Mac100 ppm.
RTD
Ready to drink (prêt à boire). Boissons alcoolisée mélangées et cocktails proposés en cannettes le plus souvent. Un marché dont on prédit régulièrement l’explosion en France, mais qui s’effondre rapidement sous le poids des taxes. Nouveau nom des prémix pour faire oublier la débandade de la fin des 90’s.
STR
Shaved-Toasted-Recharred. Désigne des fûts dont la paroi intérieure a été grattée, toastée au brasero doux puis carbonisés à la flamme vive. Un procédé mis au point par le regretté Jim Swan, qui n’utilisait pour ce faire que des barriques de vin. A la différence des fûts « rejuv » (rejuvenated, autrement dit régénérés), le STR s’applique sur des tonneaux récents, en très bon état, et non sur des barriques à pot de fleur en fin de course dont on cherche à révéler une couche de chêne neuf à exploiter. Le procédé confère rapidement au spiritueux des notes gourmandes, suaves, fruitées très identifiables… et que l’on retrouve aujourd’hui chez la quasi totalité des jeunes distilleries pressées.
SV
Signatory Vintage, excellente maison de négoce écossaise. Malins, les embouteilleurs indépendants : avec leurs noms à rallonge, ils héritent facilement d’acronymes « d’initiés ».
SWA
Scotch Whisky Association, le lobby du scotch.
TAV
Voir ABV.
TNA
Taux de non-alcool. Teneur en congénères (esters, acides gras, phénols… bref, tout ce qui n’est pas de l’alcool ou de l’eau) à l’origine de l’essentiel du goût d’un spiritueux. Surtout utilisé par les geeks du rhum : les whisky freaks préfèrent discutailler ppm.
VDN
Vins doux naturels. Dans l’industrie du whisky, cet acronyme rassemble la futaille imprégnée de vins sucrés – sauternes, rivesaltes, madère, banyuls, rasteau, pacherenc… – qui confère au spiritueux une gourmandise saccharinée.
Par Christine Lambert
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