Mais c’est valable pour les autres aussi !
Le Whisky Live Paris (WLP) prend un nouveau départ, et se propulse dans une autre dimension en investissant la Grande Halle de la Villette du 5 au 7 octobre : 189 stands à visiter (36% de plus par rapport à 2018), 6.000 m2 à ratisser (4.000 l’an dernier) : quelle que soit la façon d’attraper l’équation, vous ne pourrez pas tout goûter. Raison de plus pour discuter tactique avant “ze” week-end de la mort qui tue.
1 – Préparez un plan d’attaque
Avec une surface de 6.000 m2 à attaquer sous et autour de la Grande Halle, il va falloir faire preuve de finesse tactique. En vous aidant des infos disponibles sur le site du Whisky Live Paris, dressez la liste des malts’n’rhums & co que vous ne voulez pas rater, des nouveautés à goûter avant de craquer (ou pas) en boutique, des people que vous tenez à croiser, des masterclasses qui vous intéressent…
L’organisation en espaces bien définis va vous aider à ne pas partir en zigzag : le whisky sous la Halle, le rhum autour, la Cocktail Street autour aussi mais côté opposé. Au sein de la vaste plaine du whisky, les stands se regroupent par affinités sélectives : scotch, whiskies du monde – avec un pôle whisky français qui grignote du mètre carré –, négoce, USA, city distilleries… La logique commanderait plutôt de procéder pôle par pôle, mais personne ne vous arrêtera pour atteinte aux bonnes mœurs du malt si vous avancez en crabe de Paul John à Fettercairn, de la Distillerie de Paris (qui présente son premier whisky) à Glenrothès (la nouvelle gamme, damned) de Redbreast (les nouveaux packagings) à Signatory V.
Très important : l’ordre des dégustations. Commencez par les blends et les whiskies plutôt légers, passez ensuite aux malts et gardez les tourbés pour la fin, quand la fumée vous aura irrémédiablement laqué le palais. Idem pour les rhums : les jus light first, les agricoles ensuite, les jamaïcains et les navy rums qui vous déboitent le caisson avant de replier les gaules. Cela va sans dire, si vous avez l’ambition de passer du rhum au whisky (ou vice versa) et aux autres spiritueux, évitez les multiples allers-retours de l’un à l’autre. De la méthode, que diable ! En tout cas sur la première demi-heure. Ensuite…
2 – Oubliez votre plan d’attaque
Dans la vraie vie, une fois sur place en plein milieu d’après-midi, quand passer d’un espace à l’autre en jouant des coudes s’apparentera à la traversée du Mordor un verre à la main, oubliez le pense-nouille (un pense-bête, en moins détaillé). Vous voilà enfin planté devant Ardbeg (le nouveau Traigh Bhan 19 ans vous y tend son goulot), Bowmore (qui abandonne la coloc pour un stand à lui tout seul) ou Vélier : pas bouger. Tant pis si c’est tourbé ou hautement inflammable et qu’il vous reste les deux tiers du parcours à quadriller à pied. Et à ce propos…
3 – Venez (et surtout repartez) à pied
Ou en métro. En bus. En tram. En charriot tiré par des rennes albinos. En trottinette (et soyez maudit sur 12 générations). Peu importe, mais pas en voiture. Le whisky, ça saoule. Le rhum aussi. Le cognac, le gin, le calvados également. Même quand on utilise généreusement les crachoirs mis à disposition.
4 – Pointez-vous en mode light
Vous serez tenu·e de laisser vos sacs au vestiaire (et devrez faire le planton pendant 2h pour les récupérer en fin de salon), alors autant voyager léger. Prenez un carnet pour noter vos appréciations, un chargeur pour le smartphone qui sera à plat dès la première heure avec les photos que vous prenez/postez en cascade (hashtag #whiskyliveparis), des grains de café pour réinitialiser les capteurs olfactifs et les papilles, des fioles si vous préférez goûter certaines gnôles au calme une fois rentré·e – les stands ne sont pas tenus de vous les remplir, mais vous pouvez y glisser la dose qu’ils vous ont versée dans le verre. Du Doliprane (#jaifaitlavisitedansledesordre), des souliers confortables (cf 6.000 m2), la CB (pour grignoter dans les stands food de la Cocktail Street – la Gold si vous faites halte à la boutique).
5 – Ecumez le plateau (et pas seulement le bar VIP)
Certains habitués se contentent de cirer du coude le bar VIP, et c’est ma foi fort dommage. Car c’est le “plateau” qui donne les tendances, c’est là que se trouvent ceux qui “font le whisky”, là que le marché des spiritueux tend son miroir. Là que se lancent les nouveautés et les jeunes marques : cette année, le rhum thaïlandais Phraya, les whiskies de Milk & Honey (Tel Aviv), Moon Harbour (Bordeaux), Bimber (Londres), Starward (Melbourne), la Distillerie du Vercors, etc…
C’est au détour des stands que vous goûterez la trilogie Myths & Legends de Compass Box, le dernier Hammer Head 23 ans (les stocks sont rincés, il n’y aura plus d’autre embouteillage), le nouveau batch du 10 ans d’Armorik, le 2004 15 ans d’Eddu (sous la nappe), le Loch Lomond 17 ans bio, Octomore 10 ans et Bruichladdich Black Art 7.1, Glenfiddich 23 ans Grand Cru (affiné en fûts de champ’), Highland Park Twisted Tatoo 16 ans, le nouveau Tun de Balvenie – et son tourbé Week of Peat –, quelques Family Casks de Glenfarclas, le nouveau Johnnie Walker Blue Label Ghost & Rare (qui fait la part belle à Glenurie Royal)…
Bref. Si vous avez pris un emprunt sur 3 ans pour vous offrir le VIP, perché en mezzanine là où traînent les étoiles, faites d’abord un petit tour en bas, vous ne le regretterez.
6 – Prenez votre malt en patience (votre rhum itou)
Depuis que l’accès aux masterclasses est devenu gratuit, les premiers arrivés sont les premiers entrés – et le nombre de places, très limité. Du coup, préparez-vous à faire la queue. Les stars du WLP sont prises d’assaut plus vite que si elles distribuaient gratis du Chichibu : Luca Gargano, Dave Broom & Serge Valentin (cette année, ils brûlent les planches ensemble), Alexandre Gabriel, Marc Sassier, Neisson… vont se jouer à guichets fermés, vous voilà prévenus. Entre nous, ne ratez pas la conf de Don Livermore, autour de sa révolutionnaire roue des arômes. Passionnant !
7 – Utilisez votre langue, et pas seulement pour goûter
Echangez avec les producteurs, sollicitez les conseils et explications des personnes derrière les stands : rien de plus odieux que de tendre son verre en silence. Parlez terroir avec la bande du Domaine des Hautes-Glaces, échangez sur les geekeries avec Sam Simmons d’Atom Brands, mettez le grappin sur Billy Leighton chez Redbreast ou Method & Madness (que du bonheur), discutez fermentations longues avec les dames de Dictador (celles qui ont des jambes jusqu’au cou)…
Quand un producteur vous demande vos impressions, un peu de tact ne nuit pas si le spiritueux n’a pas fait trembler la terre sous vos pieds. Je compte sur vous pour éviter les : “Ouh la ! On se croirait chez Total à la pompe agro-carburant !” Et j’ajouterai : faites preuve d’un peu d’imagination pour ménager les egos, sachant que “Hum, intéressant ce rhum” ou “Très original, ce whisky” prononcés d’un air pénétré sont désormais plus éventés qu’un fond de bouteille.
8 – Ne prévoyez rien d’autre en soirée
Vous avez survécu à ce marathon-dégustation d’anthologie : bienvenu·e au club ! Dommage qu’il n’y ait pas de pin’s mais vous pouvez repartir avec le verre souvenir, preuve matérielle du j’y étais. Vous pouvez à présent rentrer vous écraser misérablement sur votre canapé ou, mieux, vous diriger vers l’une des afters dont les adresses circulent toujours pendant le Live… Ou encore rester sur place pour profiterez de la Cocktail Street, en accès libre et ouverte jusqu’au bout de la nuit d’autant que, samedi, Paris s’adonne à la Nuit Blanche.
Par Christine Lambert
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