Le n°1 mondial des spiritueux, très à la traîne en France, présente des objectifs ambitieux, quelques mois après avoir repris en main sa distribution dans l’Hexagone.
Quelques mois après sa création, Diageo France présentait hier son CV et ses objectifs à la presse, par la voix de son directeur général Patrick Gantier et de son directeur commercial Benoît Lohio. Pour mémoire, la multinationale britannique a repris en direct la distribution de la majorité de ses marques auparavant commercialisées via la joint venture MHD qui l’unissait à Moët Hennessy.
Le n°1 mondial des spiritueux internationaux, avec un CA de 20,5 milliards de dollars, 132 sites de production (dont 32 distilleries en Ecosse) et plus de 200 marques [parmi les plus iconiques (Johnnie Walker, J&B, Singleton, Cardhu, Mortlach, Lagavulin, Caol Ila, Port Ellen, Smirnoff, Don Julio… Oups, j’ai failli rester sur les whiskies), n’atteint pas en France les performances réalisées sur ses autres marchés. Sans doute parce que le géant français Pernod Ricard laboure avec attention ses plates-bandes, mais pas seulement.
« Diageo capte ici 8,9% de part de marché en valeur alors que notre moyenne pour l’Europe du sud s’établit à 14,8%. Nous sommes en France n°3 ou 4 quand partout autour nous arrivons en n°1 ou en solide n°2 », constate Patrick Gantier, qui relève par ailleurs la spécificité du marché français : l’un des plus importants pour le whisky.
Objectif affiché : passer la barre des 10% d’ici à 2028, en activant les leviers du premium et de l’ultra-premium et en repensant la stratégie pour chaque circuit de distribution – grande distribution, cavistes et CHR (cafés-hôtels-restaurants).
La partie caviste a été déléguée à La Maison du whisky (Lagavulin, Talisker, Don Julio, Bulleit, Seedlip) et Dugas (tout le reste : Cardhu, Caol Ila, Singleton, Dalwhinnie, Tanqueray, Zacapa…). « Travailler le réseau cavistes, qui compte pour 25% de notre CA, c’est un métier à part dans la distribution, avec des milliers de clients », plaide Benoît Lohio.
Diageo France, qui s’est lancé avec 37 marques et 61 références, dresse un premier bilan : 72% de l’activité est générée par les single malts écossais, 10% par Tanqueray et 7% par Zacapa.
« Cinq marques de luxe deviennent désormais prioritaires en France : la tequila Don Julio, qui va pousser très fort dès cet été, le gin Tanqueray, le rhum Zacapa, et les scotches Singleton et Talisker, ce dernier ayant vocation à devenir le n° 1 des whiskies tourbés », détaille Patrick Gantier.
Cardhu, qui jouait auparavant le rôle de locomotive du malt, est passé sous allocation, laissant les 3 distilleries de Singleton prendre le relai. Mais bonne nouvelle pour les amateurs de Speyside : le 12 ans revient cet été.
La tequila, la catégorie pour laquelle Diageo s’est doté d’une force de frappe nucléaire et d’une activité agricole inhabituelle dans la culture de l’entreprise (le groupe possède ses propres champs d’agaves au Mexique) reste sous-développée en France. Marché sur lequel elle a du mal à se débarrasser de la piètre image héritée des année 80 – tequila paf, anyone ?
Depuis avril Don Julio Blanco est arrivée en grandes surfaces : cet été, bonne nouvelle, on vous incitera à lâcher le Spritz pour la Paloma, en upgradant un tantinet vos compétences mixo.
Début juillet, c’est Tanqueray 0.0 qui arrive dans le réseau Nicolas, avant d’essaimer partout ailleurs dès août. Yesssssss ! Perso, je l’achetais par brassées en duty free : meilleur « gin » sans alcool pourvu qu’on le pimpe en Gin To avec un trait de liqueur de gin bergamote LGB d’Audemus.
En Espagne, royaume du gin, le 0.0 pèse déjà 22% des ventes de Tanqueray. « Le nolo est une tendance de fond que Diageo veut accompagner. Dans les mois et les années qui viennent, nous allons développer cette offre. » Car le sans-alcool, qui prospère essentiellement dans les lieux festifs, est l’un des vecteurs pour parler… d’alcool.