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Single malt, blend, bourbon, rye, blended malt… Comment retrouver ses petits dans la jungle du whisky, sans se fusiller les neurones ni se frire le cerveau.

Il y a peu, sur un réseau social désormais classé X, une question simple – quels sont à votre avis les 10 single malts les plus vendus en France ? – a suscité un flot de réponses pleines d’imagination. Qui m’a fait comprendre qu’on pouvait profiter de la rentrée des classes pour réviser les bases. C’est parti ?

Commençons par le commencement : “whisky”, “single malt”, “bourbon” et “scotch” ne sont pas des synonymes. Nope. Dommage, on se passerait volontiers de périphrases lourdingues pour éviter les répétitions : “nectar d’orge”, “noble eau-de-vie de malt vieillie”, “spiritueux ambré”… Han. Sortez les rames, j’ai un papier à écrire.

Faut pas prendre les enfants du bon dieu pour des canards sauvages

Le terme “whisky” définit la catégorie générique qui rassemble tous les autres (single malt, bourbon, rye, corn whisky, scotch, etc). Autrement dit, tous les single malts sont des whiskies mais tous les whiskies ne sont pas des single malts. De même, tous les canards sauvages sont des oiseaux mais tous les oiseaux ne sont pas des canards sauvages – ni les enfants du bon dieu.

Un whisky est élaboré à partir de n’importe quelle céréale : orge, blé, maïs, seigle, sarrasin… Mais un single malt est obligatoirement fabriqué à base d’orge maltée (orge maltée = malt). Tandis que le bourbon, par exemple, s’appuie sur le maïs. Un point malt ? Le maltage consiste à faire germiner l’orge puis à interrompre le processus brutalement en la séchant, afin de transformer son amidon en sucres fermentescibles. Pour rappel, c’est toujours à partir d’un sucre – celui de la céréale, du fruit, de la canne… – qu’on fabrique de l’alcool. Même pas malt !

Le “scotch” désigne le whisky écossais, et lui seul (l’adjectif “scotch” signifie “écossais” en anglais – bien qu’il ait presque disparu du vocabulaire). Le scotch irlandais, cela n’existe pas. Le scotch japonais non plus. Et le scotch écossais est un pléonasme.

Le “single malt” est élaboré à base d’orge maltée (aka malt, comme son nom l’indique), dans une seule et unique distillerie (et non pas distillé par un célibataire*). Glenfiddich, Aberlour, Lagavulin, Macallan, Armorik, Rozelieures et moult autres sont des single malts, pour citer quelques vedettes dans cette aristocratie du whisky.

Blend et blended malt : rien à voir !

Alors qu’un “blend” assemble des whiskies de malt et des whiskies de grain (maïs, blé, orge non maltée…) issus de différentes distilleries. Blend, en anglais, signifie “assemblage”, et c’est le mot que les Français retiennent, mais les Anglo-Saxons parlent de “blended whisky” ou de “blended scotch” (“whisky d’assemblage” ou “whisky écossais d’assemblage”). Chivas, Ballantine’s, Johnnie Walker, J&B ou Cutty Sark en Ecosse, Jameson, Tullamore Dew, Paddy en Irlande, Canadian Club au Canada, WB, Eddu Grey Rock ou Lefort en France sont des blends.

Le piège : si les étiquettes des single malts précisent toujours qu’il s’agit d’un single malt – mention hautement valorisée – celles des blends font parfois l’impasse. Oh, pas en Ecosse, non. Mais les blends irlandais ou français (Lefort) se contentent volontiers de la mention “whisky”.

Pour semer un peu plus le flou avant même d’attaquer le premier verre, les choses se compliquent avec les “blended malts”. Késaco ? Un assemblage de whiskies de malt, tout simplement (même si justement ce n’est pas simple). Un blended malt marie donc différents single malts, en provenance de plusieurs distilleries. Je sais, moi aussi j’ai envie de m’arracher les couettes en couinant devant ce manque flagrant de clarté pour nommer les choses…

Alors, pour illustrer de quelques exemples : Monkey Shoulder, Big Peat, Peat Monster, Copper Dog, Caisteal Chamuis en Ecosse, Nikka Taketsuru au Japon, Bellevoye ou la plupart des Alfred Giraud en France sont des blended malts. En France, on parle parfois de “triple malt” (assemblage de single malts issus de 3 distilleries, puisqu’on n’a pas les stocks pour en mélanger davantage), à ne pas confondre avec un “triple cask” (assemblage de 3 types de fûts). Doliprane ? My treat.

Le “single grain” et le “blended grain” fonctionnent sur la même logique, mais avec d’autres céréales que l’orge maltée. Inutile de vous encombrer les méninges avec ces deux-là, ils existent à peine sur le marché.

Aux USA, y a pas que le bourbon dans la vie (mais presque)

Aux Etats-Unis, la classification diffère un peu. Pour résumer, le “bourbon” (de loin le whisky américain le plus exporté en France) contient au minimum 51% de maïs et fait ce qu’il veut pour le reste – un mélange blé, seigle, malt en général. Un bourbon est forcément américain (bon, en fait c’est un peu plus compliqué de cela, vous connaissez le refrain, mais cette assertion s’applique en Europe). Citons Jim Beam, Heaven Hill, Elijah Craig, Buffalo Trace pour illustrer les bourbons.

Le “rye” (“seigle” en anglais) contient forcément plus de 51% de seigle. Quelques ryes fameux chez Rittenhouse, Michter’s, Bulleit, Domaine des Hautes-Glaces… Car contrairement à la mention bourbon, le rye peut se fabriquer n’importe où dans le monde.

Le “malt whisky”, à ne surtout pas confondre avec le single malt, intègre a minima 51% de… malt, je vois que vous suivez (oui, vous, les autres ont décroché depuis belle lure). On en trouve chez Woodford Reserve ou Balcones. Et le “Tennessee whisky” est un bourbon du Tennessee, quoi qu’en dise Jack. Oubliez le “corn whisky” (whisky de maïs), compliqué et personne n’en boit.

On termine sur la question qui tue, la question qui reste sans réponse, à moins de caricaturer exagérément. OK, puisque vous insistez ! En termes de goût et d’arômes, en quoi ces multiples types de whiskies se distinguent-ils ? Attendons que la migraine s’estompe, on s’en reparle une prochaine fois.

(*) Single : seul, unique, célibataire en anglais.

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