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Spécialiste des spiritueux, Matthieu Acar signe Une brève mais intense histoire du whisky français, publié aux éditions Flammarion. Ce livre, qui reconstitue les quarante premières années du whisky français, est le fruit d’une enquête entamée en 2015 à travers toutes les régions de France. Pour Whiskymag.fr, Matthieu Acar revient sur la genèse de ce projet et sur ses découvertes.

D’où vient cet intérêt pour le whisky et la production française ?

J’ai eu le déclic à 28 ans, en dégustant un Uberach 2003 de la distillerie Bertrand. À ce moment-là, j’ai la conviction qu’il se passe quelque chose en France et qu’il faut creuser. Avec un ami, Xavier Brevet, on a commencé en 2016 à répertorier les producteurs du pays sur un site, whiskyfrançais.com. On a pris le volant pour faire le tour des régions et rencontrer ces pionniers qui s’étaient lancés dans l’aventure.

On a découvert un monde pas du tout codifié, très lointain du modèle écossais, avec son incroyable variété d’alambics, de matières premières, de fûts et d’approches. Et c’est vraiment cette diversité qui m’a donné envie d’en savoir toujours plus. 

Et qu’est ce qui t’a poussé à te lancer dans un tel ouvrage ?

C’est assez simple, j’avais la matière, La Maison du Whisky m’a proposé d’écrire ce livre avec les éditions Flammarion. À La Maison du Whisky, on s’intéressait déjà à la catégorie depuis quelques années, on accompagne la distillerie des Menhirs depuis le début et Warenghem depuis 2009. On avait lancé la gamme Version Française dédiée aux spiritueux français en 2020. 

Ensuite, l’année 2023 marquait les 40 ans de la première distillation documentée en France. Au-delà de cette date symbolique, après toutes ces années d’expérimentations et de tâtonnements, le whisky français avait atteint une certaine maturité. C’était vraiment le moment rêvé pour écrire un livre de référence sur le sujet. 

Quelles ont été tes sources principales ?

Pour la partie historique du livre, j’ai réalisé un gros travail de recherche dans les archives, j’ai épluché les sites de Retronews et Gallica, pour retrouver les traces des premières distillations de céréales en France. 

Mais surtout, j’ai fait le tour des distilleries. Le livre en recense plus de 80, je me suis beaucoup déplacé pour les rencontrer. J’avais déjà rassemblé une documentation importante sur whiskyfrancais.com mais ces voyages ont permis de vérifier des infos, de faire de nouvelles rencontres et surtout, de réunir une iconographie cohérente. Une grande partie de notre travail a été consacrée à ces reportages photos à travers la France, réalisés par Darmesh Varane. 

Le livre montre que l’on produit en France du whisky comme dans aucun autre pays au monde. En quoi le whisky français marque ses différences ?

Toute une partie du livre est consacrée aux savoir-faire des producteurs français. Elle démontre qu’on se démarque des productions écossaises, japonaises ou d’ailleurs, en matière de techniques à chaque étape de production. Pour documenter ce chapitre, j’ai discuté avec des malteries, des brasseurs, des tonneliers, des bouilleurs, des affineurs. Je suis allé voir certaines machines sur place, j’ai discuté avec les chaudronniers qui fabriquent les alambics Stupfler, Muller, Hollstein…  

Cette diversité incroyable d’alambics, parfois très anciens, explique que l’on produise des distillats uniques en France. Pour expliquer leur fonctionnement, on a réalisé une magnifique galerie des alambics, illustrée de schémas réalisés par l’agence DeValence.

Aujourd’hui, la France peut devenir une grande nation du whisky ?

D’abord, nous avons une culture du goût et du produit difficilement comparable avec d’autres pays. Nous sommes attentifs à des typicités organoleptiques précises liées au terroir, c’est l’héritage de siècles de production de vin et de cognac. C’est un atout énorme pour le whisky français. Nous avons également tout ce qu’il faut pour faire du whisky : une production de céréales de qualité, une maîtrise de la distillation avec entre autre les distillats de vins (armagnac, cognac) que l’on a commencé à produire vers 1300, une grande culture brassicole et tonnelière, des forêts exceptionnelles… Le french oak, c’est un bel argument marketing dans le monde du whisky ! 

Que reste-t-il à faire pour que la catégorie perce réellement ?

Dans les rayonnages, il y a moins de 10 ans, le whisky français était plus que marginal. Pour le public, soit la catégorie n’existait pas, soit elle était perçue comme peu qualitative. Et si on achetait un whisky breton, c’était au mieux pour faire un clin d’œil à un copain breton. 

Nous avons fait un pas énorme en 2015, avec la création des IGP Bretagne et Alsace qui ont permis de crédibiliser la catégorie, et la future IGP whisky de France sera plus déterminante encore . Depuis le confinement, les ventes ont beaucoup augmenté, on est arrivés à 1,5 million de bouteilles de whisky vendues par an. Bien sûr, nos chiffres n’ont absolument rien à voir avec ceux des Écossais qui ont plusieurs siècles d’avance et une approche plus industrielle où le whisky français demeure résolument artisanal. On est encore au tout début de l’histoire. Il faut que la catégorie continue de grandir, poussée par le travail conjoint des cavistes, des journalistes, des prescripteurs. Il y a encore du pain sur la planche et c’est excitant !

UNE BREVE MAIS INTENSE HISTOIRE DU WHISKY FRANCAIS  par Matthieu Acar

Éditions Flammarion

288 pages – 21 x 28 cm 

45,00 €

Signature du livre par Matthieu Acar et dégustation de whiskies français :
– le 13 décembre 15h-19h, La Maison du Whisky, 20 rue d’Anjou, Paris 8e.
– le 20 décembre 15h-19h, La Maison du Whisky, 6 carrefour de l’Odéon, Paris 6e.

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