Skip to main content

La flamboyante master blender de la distillerie suédoise pionnière ne cesse de nous étonner par ses créations atypiques, ses expressions originales, à son image. Dernière en date : Grönt Te, un single malt affiné en fûts de… thé vert.

Finishes en fûts de vin de baies arctiques, malts fumés sur bois de genévrier, utilisation de chêne suédois… Sortir des sentiers battus, c’est votre signature ?

J’ai une personnalité “outside the box”, j’aime essayer, tenter des choses, repousser les limites. Même une simple recette de cuisine, je suis incapable de la suivre au-delà du premier tiers sans la modifier. Quand j’ai débuté dans l’assemblage, Jim McEwan, qui était alors chez Bruichladdich, m’a beaucoup encouragée à trouver ma propre voie.

Grönt Te (“thé vert”, en suédois) : encore un single malt qui sort de l’ordinaire. D’où vous vient cette idée ?

J’ai découvert le thé vert au Japon, et je me suis prise de passion pour ce breuvage. Forcément, je me suis demandé comment lier cet intérêt à celui que je porte au whisky. J’ai commencé des essais de macérations avec différentes sortes de thés, dans de petits fûts de 30 litres, avant d’y loger du whisky. Et le résultat m’a semblé intéressant.

On a pu lire ici ou là que les fûts étaient imprégnés de “liqueur de thé”…

Non, pas du tout ! Il ne s’agit pas de liqueur, il n’y a aucun ajout de sucre : le thé infuse d’abord dans de l’alcool neutre, et je réduis ensuite cette macération avec du xérès, pour apporter d’autres notes à la trame très végétale du thé. En phase de production, on a utilisé des barils de chêne américain de 128 litres, avinés pendant deux mois. Et j’y affine pendant 19 mois des whiskies qui ont déjà vieilli environ 5 ans en ex-fûts de bourbon.

Une usine à gaz, cette recette !

Plus encore que vous ne l’imaginez. J’ai retenu quatre variétés de thés verts : le sensha, pour son élégance (il entre en plus grandes proportions dans l’assemblage), le matcha, plus doux, le gyokiro, subtil et herbacé, et le hojicha, plus tannique. En single cask, chacun donnait des résultats fantastiques ! Mais dans l’assemblage final, il y a aussi des single malts vieillis en fûts de xérès oloroso, en petits fûts de bourbon de 100 litres premier remplissage, en fûts de bourbon standards, des finishes xérès, un peu de single malt de 16 ans environ… Les fûts de thé, si je puis les appeler ainsi, sont loin d’être majoritaires dans le blend. Ces notes très vertes, très végétales, tanniques, sont à manier avec prudence. Mais le whisky utilisé pour mes essais dort toujours dans les fûts de 30 litres : on va voir ce que ça donne…

Mackmyra a sorti le premier single malt créé par intelligence artificielle, Intelligens. Vous allez bientôt perdre votre job ?

Ah ! Ah ! Bien au contraire. On a entré soixante-dix recettes dans le programme, et toutes les données possibles et imaginables sur nos whiskies : les ventes, les médailles, les commentaires de dégustations, les réactions des consommateurs… À charge pour le logiciel de nous créer le whisky idéal. Mais il nous a sorti des recettes impossibles à reproduire, avec des proportions comme : 0,5 cl de ceci, 10 cl de cela, 5 cl, etc. Et comme beaucoup de nos whiskies fumés sont multi-médaillés, il en avait déduit qu’il fallait forcer la dose de whiskies tourbés. Il a fallu tout reparamétrer pour que le programme nous livre cinq nouvelles recettes, et j’en ai choisi une.

Le whisky que vous auriez aimé créer ?

Un “world blend” comme That Boutique-y. C’est une idée tellement cool !

La chose que vous auriez aimé savoir plus tôt dans votre carrière ?

Aucune, vraiment. Honnêtement, j’ai tiré profit de chaque erreur commise.

À quoi s’attendre chez Mackmyra à la rentrée ?

À un whisky d’automne riche, qui vous entraînera par la pensée et par le goût dans les forêts suédoises.

 

Par Christine Lambert

Laisser un commentaire

Inscrivez-vous à notre newsletter