Stratégies anti-gueule de bois pour savourer les réveillons et terminer l’année en beauté.
24 ou 31 décembre au soir, le moteur s’est emballé au rythme des bouchons qui sautent, et vous êtes passé en quelques heures sur l’échelle du bien-être de “Highway to Hell” à “Stairway to Heaven” au milieu d’un troupeau d’éléphants roses dansant la lambada. Ce mirage, sachez-le, se paie en différé.
Une dizaine d’heures plus tard, vous vous sentez l’énergie d’un poulpe mort, un casque à pointe posé à l’envers sur la calebasse, la tirelire en palissandre et les yeux dans les coins en poisson pané Findus. Préparez-vous à encaisser pendant 6 à 12h selon les cas, et écoutez pousser vos cheveux en attendant que ça passe.
Comment s’épargner la veisalgie – terme médical tiré du norvégien kveis (“inconfort succédant à la débauche” et du grec algia (“douleur”) –, mieux résumée par l’expression “gueule de bois”? Le seul truc qui ait fait ses preuves avec un taux de succès de 100%: ne pas ingérer d’alcool. On obtient également d’excellents résultats en se contentant d’une consommation raisonnable. Pour la définition de “raisonnable”, voire l’OMS plutôt que tonton Marcel.
Boire moins mais mieux est un concept particulièrement bien adapté aux fêtes. Servez de belles bouteilles, en nombre restreint mais bien choisies (exemples ici), sirotez lentement, posez votre verres entre les gorgées, faites durer le plaisir. Ralentissez le temps que vous voyez filer trop vite en fin d’année.
Préférez les longs drinks très allongés à l’apéritif: highballs 1/7, gin-to extra tonic, mules bien dilués… Pensez au trait de liqueur (limoncello par exemple) noyé dans le tonic sous les glaçons, pour changer.
La communauté scientifique est partagée
Mes conseils vous ont laissé de marbre, et c’est pour cela qu’on a judicieusement placé Dry January un lendemain de veille. Vous cherchez à présent à réduire les effets de la grande fatigue post-réveillon qui vous étreint – qu’en termes délicats ces choses-là sont dites. Pour les miracles, voir avec le père Noël.
Dans la vraie vie, il n’existe aucun remède au casque à boulons. “Tout simplement parce que nous ne sommes toujours pas certains de savoir précisément ce qui provoque la gueule de bois, ce qui se passe dans l’organisme entre le moment où l’on ingère de l’alcool et celui où l’on se retrouve en vrac”, explique Sean Johnson, chercheur sur le sujet à l’université de Bristol.
Ce qui semble établi: ce sont les substances produites lors de la métabolisation de l’alcool (en particulier l’acétaldéhyde) qui vous transforment en créature aussi vivace qu’un salsifis mal cuit. Mauvaise nouvelle, plus votre spiritueux préféré est riche en congénères (les composés aromatiques qui lui donnent du goût), plus les symptômes seront sévères. Traduction: les spiritueux élaborés sur une base d’alcool quasi-neutre (gins, vodkas, rhums ultra-légers…), pauvres en congénères, se montrent moins rancuniers le lendemain.
Les excès au Bacardi rectifié en multicolonne feront toujours moins mal qu’une accidentelle bacchanale au Hampden DOK (courage!). Pourquoi diantre abuser du Bacardi, vous demandez-vous? Et permettez-moi de ne pas répondre, bien qu’il soit trop tard pour terminer l’année sans fâcher personne.
Accessoirement, si vous mélangez les spiritueux, vous élargissez mécaniquement le spectre des congénères absorbés… et augmentez potentiellement les effets secondaires indésirables. Boire beaucoup d’eau entre deux verres d’alcool n’évite en rien la veisalgie mais a le mérite d’atténuer la déshydratation.
Poires coréennes vs poires normandes
Peut-on limiter la casse en préventif ou après-coup? En gros, non, même si chaque pays, chaque région, chaque famille, chaque personne prétend détenir le secret du remède universel (régime de bananes, soupe aux tripous, jus de cornichons, bol de riz au thé vert, infusion menthe-gingembre, porridge…).
Une étude menée en 2022 a testé la prise d’extrait de clou de girofle, d’acide tolfénamique, de pyritinol et autre ginseng rouge. Pour des bienfaits très limités qui vous épargneront de googler ces mots.
En 2015, des chercheurs australiens ont suggéré que l’ingestion de jus de poires coréennes précédant la consommation d’alcool en réduisait les effets désagréables et diminuait le taux d’alcool dans le sang de 20%, tout en faisant chuter la concentration d’acétaldéhyde. Peut-on y substituer du jus de poires normande? J’attends votre retour d’expérience.
En 2009, une autre étude publiée dans le Journal of Food Science laissait entendre que la consommation préventive d’asperges allégeait les symptômes des excès et protégeait le foie de certaines toxines. N’hésitez pas à croquer une asperge entre deux noix de cajou, ça ne peut pas faire de mal.
Siffler un bloody mary le lendemain ne supprime pas l’apparition des symptômes mais se contente de les retarder. Fermez les yeux, pensez à Dry January.
Alors soyez sage et faites bien attention à vous. Passez de merveilleux réveillons de fin d’année, on se refait signe en 2026.
(Photo: kflaim/Fickr)



