La première rencontre des deux fondateurs de Fever Tree, Tim Warrilow et Charles Rolls, eu lieu dans un pub de Sloane Square. Des années plus tard, leur marque fait un véritable carton mondial. Interview avec Tim Warrilow, CEO de la marque de Mixer.
Aujourd’hui, de nombreuses petites marques lancent leur propre gamme de premium mixers, mais Fever-Tree a été un véritable pionnier au début des années 2000. A cette époque, quel a été le point de départ de cette aventure ?
Tim Warrilow : A l’époque, la catégorie des mixers était vraiment négligée et dominée par quelques grandes marques plus motivées par la productivité et le gain que par la qualité et les arômes de leurs boissons. Et pourtant, c’est à cette époque que les consommateurs ont commencé à s’intéresser de plus en plus à la provenance et l’élaboration de leurs produits. Ce qui nous a vraiment frappé c’est que les gens dépensaient beaucoup d’argent dans d’excellents spiritueux premium et autres gins artisanaux mais se voyaient dans l’obligation de les noyer avec des mixers de mauvaise qualité. Charles et moi pensions (et nous le pensons toujours !) que si ¾ d’un cocktail est composé d’un mixer, il faut sublimer le spiritueux avec un mixer de qualité.
Fever-Tree propose une gamme de 13 mixers en France. Comment tous ces parfums ont été mis au point ?
Quand nous avons créé la marque, nous souhaitions remettre en avant la qualité dans la catégorie des mixerset ce dans tous les domaines : du packaging aux visuels, en passant par notre perfect serve mais aussi et surtout nos ingrédients. En effet, nous avons une approche très différente des autres entreprises en ce qui concerne le développement. Afin de mettre au point nos recettes, nous avons commencé par nous plonger dans de nombreux livres d’Histoire pour trouver les ingrédients les plus authentiques et de la meilleure qualité possible avant d’aller ensuite sur le terrain pour trouver ces ingrédients et passer du temps avec leurs petits producteurs. Nous sommes donc allés aux 4 coins du monde, de la République Démocratique du Congo pour trouver la quinine qui entre dans la composition de tous nos tonics, à la Côte d’Ivoire pour le gingembre vert frais en passant par le Mexique où se trouve notre producteur d’oranges amères.
En quoi Fever-Tree est différent de ses concurrents ?
Je pense que cela est surtout lié à la qualité de nos produits et à l’innovation. C’est notre approche sans compromis qui nous a menés aux quatre coins du monde afin de trouver les meilleurs ingrédients, qu’il s’agisse par exemple de notre orange amère du Mexique ou de notre quinine provenant de la République Démocratique du Congo. Je ne connais pas d’autre entreprise qui mettrait autant de cœur et d’effort pour trouver ses ingrédients, et c’est ça qui fait la force de Fever-Tree.
Les boissons artisanales semblent connaître un véritable regain de popularité (et de diversité), est-ce que cela est dû au fait que les consommateurs sont de plus en plus attentifs à la qualité des produits qu’ils achètent ?
Quand Charles et moi avons créé Fever-Tree, nous sentions que les gens étaient prêts à mettre le prix pour des mixers premium, car c’était déjà le cas pour les spiritueux de qualité. Les tendances que nous avions identifiées au début de notre aventure sont maintenant en train de s’accélérer. Nous avons observé que les consommateurs sont plus attentifs à la qualité : ils recherchent des spiritueux haut de gamme.
Mais les gins ne représentent que 6% des spiritueux premium, nous avons donc une vraie opportunité sur les autres catégories de spiritueux. La part des spiritueux bruns, par exemple, est 10 fois plus importante que le gin, et nous sommes aujourd’hui la première entreprise à développer une gamme entière de mixers dédiée à cette opportunité remarquable.
Ce que nous observons également, c’est que les nouvelles générations de consommateurs se détournent de plus en plus de certaines habitudes de consommation, comme la consommation pure ou sur glace, qui ne sont plus compatibles avec notre rythme de vie moderne et l’attention que nous portons à notre santé. La consommation évolue maintenant vers les long drinks, composés d’un spiritueux et d’un premium mixer. De plus en plus de marques de spiritueux (petites et grandes) font la promotion des long drinks avec un mixer et cette tendance commence déjà à prendre des parts de marché sur la consommation de vins et de bière.
Fever-Tree a gagné de nombreuses récompenses depuis son lancement. Cette année encore, Fever-Tree a été nommée marque de tonic la plus vendue et la plus tendance pour la sixième année consécutive selon le classement Drinks International (établi auprès des 100 meilleurs bars au monde). Comment expliquez-vous une telle reconnaissance de la profession ?
Depuis le début, nous avons pris conscience qu’il était très important d’avoir le soutien de la profession. N’ayant pas de gros budgets à dédier à des campagnes publicitaires comme le font la plupart des grandes marques, nous avons envisagé notre marketing d’une façon très différente. Nous avons décidé de collaborer avec des bartenders et des chefs – des gens qui ont une vraie influence sur les consommateurs. Et nous avons vite été soutenus par les plus grands créateurs de tendance au monde, comme Robert Parker, un des plus grands œnologues des Etats-Unis, Jamie Oliver en Angleterre et Ferran Adria, anciennement chef étoilé d’El Bulli en Espagne, et qui est devenu tellement fan de Fever-Tree qu’il a créé un plat en utilisant notre tonic.
Les consommateurs cherchent de plus en plus à vivre de véritables expériences de marque. Comment cela a influencé l’identité de marque et la façon dont Fever-Tree communique avec ses consommateurs ?
Nous avons toujours voulu susciter l’intérêt de nos consommateurs, et pour nous, cela passe par communiquer directement avec eux. Depuis toujours, c’est notre objectif sur nos bars éphémères et événements. Cela nous a permis de faire goûter nos produits et donc de recruter de nouveaux consommateurs.
Comme la notoriété de Fever-Tree a grandi, notamment en Angleterre, nos événements et partenariats ont également beaucoup grandi. L’événement le plus célèbre à ce jour est le tournoi de tennis Fever-Tree Championships au Queen’s Club à Londres.
Même si en France, nous n’avons pas encore d’événement de cette ampleur, notre priorité reste tout de même de faire goûter nos mixers grâce à des activations expérientielles. Par exemple, Fever-Tree sera mis à l’honneur sur quelques terrasses à Paris et en région cet été et nous avons également un pop-up bar dédié à la marque qui vient d’ouvrir et sera en place jusqu’à la fin de l’année !
Le gin est en plein essor en France depuis quelques années maintenant, tout comme son cocktail phare, le Gin & Tonic. Selon vous, quelle sera la prochaine tendance en termes de long drink ?
Tout d’abord, je pense que le gin & tonic est et restera un long drink de référence dans les années à venir. En effet, la diversité des gins et des tonics peut nous permettre d’imaginer de nombreuses possibilités, c’est un cocktail qui n’a pas fini de nous surprendre ! Chez Fever-Tree, nous avons établi quatre catégories de gin et avons imaginé quatre tonics conçus pour sublimer les palettes aromatiques particulières de chacune de ces catégories. Par exemple, notre Elderflower Tonic, aux saveurs délicates de fleurs de sureau, a été spécifiquement pensé pour sublimer les gins frais et floraux.
D’autres tendances sont également en train de voir le jour en France. Il faut bien sûr citer le Moscow Mule dont la popularité se renforce un peu plus chaque année. Son goût rafraichissant, issu du ginger beer en fait un cocktail idéal pour l’été.
Enfin, les boissons sans alcool ou faiblement alcoolisées sont également de plus en plus appréciées. Ces cocktails plus légers constituent une véritable tendance qui est pour l’instant à ses débuts. Les vermouth tonic, apéritif tonic, et cocktails sans alcool permettent de répondre à une véritable attente des consommateurs et vont, selon moi, être de plus en plus présents sur les cartes de nos clients.
Où voyez-vous Fever-Tree dans 5 ans en France ?
Comme je l’ai dit déjà dit, la croissance de la catégorie des gins et l’essor des Gin & Tonic ont montré une vraie demande sur les longs drinks composés d’ingrédients de qualité, et nous continuons à observer cette tendance tout autour du monde. Cette évolution vers un cocktail simple et qualitatif met en évidence le rôle croissant des mixers premium comme Fever-Tree pour répondre à la demande des consommateurs, dans les bars comme à la maison.
L’un des points forts de la marque est véritablement sa capacité à innover. Je pense que les apéritifs et vermouths constituent une vraie piste. Ces deux catégories fonctionnent vraiment parfaitement en long drink avec nos tonics. Nous avons d’ailleurs déjà fait quelques activations autours de ces boissons avec des marques partenaires. Soutenus par un marché en pleine croissance en France comme en Europe, nous voyons de plus en plus d’opportunités de co-promotions comme celles-ci pour mettre en avant toute notre gamme.
Quel est votre Fever-Tree préféré ?
Choisir un seul mixer serait comme choisir un de mes quatre fils, c’est juste impossible ! Mais pour l’été, je pense qu’il n’y a rien de meilleur qu’un cocktail avec notre Mediterranean Tonic Water ! Cette recette contient des huiles essentielles de thym et de romarin de Provence et un peu moins de quinine, ce qui rend ce tonic encore plus parfumé. Si vous le mélangez avec un gin sur l’agrume ou herbacé, beaucoup de glace et un brin de romarin, vous obtiendrez un Gin & Tonic parfait pour l’été.
Interview à relire dans Whisky Magazine 77