Archi, le cocktail en bouteille à base de Glenmorangie 18 ans et de Poiré de chez Nusbaumer, est la rencontre entre Franck Audoux de Cravan et Bill Lumdsen, master distiller d’Ardbeg, Glenmorangie et Glen Moray. Interview.
Dr Bill, comment est née votre collaboration avec Cravan ?
Bill Lumdsen : Pour tout vous dire, je commence à apprécier les cocktails, en particulier ceux à base de whisky. J’adore le Negroni, par exemple, et certains des cocktails classiques. Mais dans les cocktails à base de whisky, il faut que le goût du whisky reste présent. La plupart des mixologues que j’ai rencontrés utilisent certaines de nos expressions les plus jeunes pour préparer des cocktails. Lorsqu’on m’a présenté Frank Audoux dans son bar Cravan du 16ème arrondissement, dans cet incroyable immeuble Guimard, j’ai été frappé par son approche. Je n’ai pratiquement jamais vu de gens utiliser quelque chose d’aussi rare et d’aussi cher que notre 18 ans d’âge. J’étais donc très intrigué.
De cette rencontre est né Archi, un cocktail en bouteille à base de Glenmorangie 18 ans et de cordial de Poiré de chez Nusbaumer. Quelles ont été les étapes pour arriver jusqu’à Archi ?
Franck Audoux : Ce qui est très intéressant, pour moi, c’est au travers du cocktail, de créer une connexion entre des mondes et des gens différents. Lorsque Bill est venu chez Cravan pour la première fois, j’avais déjà travaillé sur un prototype. Lorsque je crée un cocktail avec un Glenmorangie 18 ans, mon point de départ, c’est le Glenmorangie. Avec une condition sine qua none, le respect total du produit. Je travaille comme un horloger, avec l’idée de pousser une saveur, un goût. J’aime un peu le « pas de côté« . C’était donc l’idée avec Archi. C’est ce que j’ai expliqué à Bill lorsqu’il est venu chez Cravan.
Qu’est-ce qui vous surprend dans le travail de Franck ?
Bill Lumdsen : Au départ, pour être franc, je n’étais pas à l’aise avec l’idée qu’on utilise un 18 ans dans un cocktail. Mais cela m’a vraiment intrigué. Je pense que Franck s’est lancé un défi et cela m’a beaucoup plu parce que ça me ressemble : j’aime le danger, les problèmes, les défis. La facilité m’ennuie. En tant qu’ancien boxeur, j’ai pensé qu’il y avait quelque chose de similaire dans nos personnalités. Puis, j’ai goûté le cocktail. Je m’attendais à ne pas l’aimer, mais je l’ai trouvé tout simplement fabuleux.
Comment caractérisez-vous le travail de Dr Bill, sa façon de travailler avec le produit ?
Franck Audoux : La base commune, c’est la curiosité. Chez Cravan, le plus important pour un client est d’être curieux. Curieux de goûter quelque chose de différent, curieux d’écouter de la musique différente, curieux de lire un livre différent. Il y a donc une curiosité, et je sais que Bill, lorsqu’il travaille avec du whisky, est très attaché à l’édition spéciale. Nous voulons essayer quelque chose de différent, d’inattendu, et atteindre quelque chose d’exceptionnel. De différent de ce que les règles ont l’habitude de servir.
Vous pouvez nous décrire Archi ?
Franck Audoux : Si je peux décrire le cocktail, Archi est très simple. Deux ingrédients. Glenmorangie 18 ans et cordial de Poiré de chez Nusbaumer. J’aime la simplicité, parce qu’elle ouvre toujours à la complexité, aromatique notamment. Avec Archi, je me suis dit que je devrais pousser plus loin les notes de poire qui apparaissent clairement chez Glenmorangie, en particulier dans l’original et le 18 ans. Il ne s’agit donc pas de jouer avec une autre aromatique, mais simplement de pousser plus loin la typicité. Et en poussant la typicité, on entre dans une autre dimension du whisky et du cocktail.
Puisqu’on parle de typicité, comment définissez-vous celle du Glenmorangie 18 ans ?
Bill Lumdsen : C’est un whisky très complexe. Il contient tellement d’arômes différents que vous auriez pu l’orienter dans différentes directions. On aurait pu accentuer les arômes de miel, accentuer les arômes de noix et de cuir, ou peut-être les arômes de citron balsamique. C’est un whisky incroyablement doux, et je pense que le poiré est probablement la saveur la plus douce et la plus moelleuse que l’on puisse trouver dans ce whisky. Je pense que c’est une autre raison pour laquelle j’aime Archi. L’idée est de suivre la saveur plutôt que de la tordre.
L’autre chose que je dirais à propos de la typicité du Glenmorangie 18 ans d’âge, c’est que même s’il possède sans doute l’une des gammes d’arômes les plus complexes de tous les whiskies, il est facile à boire. Je ne suis pas quelqu’un de très détendu et je pense que boire le 18 me calme.
C’est votre préféré ?
Bill Lumdsen : C’est difficile à dire. Mais je pense que le 18 ans résume le meilleur de Glenmorangie. Je n’ai fait que peaufiner la recette du 18 ans d’âge. Il existait déjà lorsque j’ai rejoint la société il y a 30 ans. Mais il était très axé sherry. J’ai donc essayé de faire en sorte qu’il reflète davantage le style classique de la maison, la typicité, que nous avions déjà dans l’original.
C’est la raison pour laquelle vous avez choisi le Glenmorangie 18 ans ?
Franck Audoux : Oui, exactement, et c’est aussi pour cela que dans ce cocktail, Archi, la poire doit révéler la poire. Il s’agit en quelque sorte d’une mise en abîme. La première mise en bouche, c’est totalement Glenmorangie, la finale, totalement Glenmorangie 18 ans d’âge, et au milieu, on va, j’ai essayé d’aller au-delà du Glenmorangie, et le pousser ailleurs, pour compléter cette « mise en abyme ».
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