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Il y a quelques années, le clairin était encore une boisson exclusivement locale, réservée aux habitants de Haïti et à une poignée de voyageurs audacieux. Un rhum magnifiquement brut, comme il n’en existe nulle part ailleurs, indissociable de la vie haïtienne.

Quand Luca Gargano, patron de Velier et imprésario du clairin sur les scènes internationales, décide de faire vieillir un spiritueux historiquement blanc, les amateurs retiennent leur souffle et se demandent bien ce que l’Italien va sortir de ses manches. Et comme notre homme n’est pas du genre à faire les choses à moitié, il a commencé par faire construire son propre chai de vieillissement à Port-au-Prince, capitale d’Ayiti, pour y mettre à vieillir le clairin à domicile et en utilisant sa propre futaille acquise au travers des dernières décennies. Et le choix ne manque pas : anciens fûts de single malt, de demerara, de Caroni, Hampden, calvados, armagnac, etc… Un cheptel de barriques d’exception qui constitue autant de témoignages de ses aventures qu’il fusionne comme pour leur donner une continuité et une légitimité constante. Mais c’est aussi et surtout un terrain de jeu fabuleux et singulier qui permettra aux amateurs, et espérons-le aux locaux, de découvrir l’incidence du bois et du temps sur les merveilles aromatiques que sont les clairins. À partir de fin 2015, Luca Gargano met ainsi en dormance pour la toute première fois de leur histoire les pur jus des producteurs Michel Sajous, Faubert Casimir et Fritz Vaval. Il surveillera constamment leur évolution, avant de laisser la gageure de la sélection aux huit bartenders finalistes qu’il a invités, en mai 2018, à participer à la seconde édition du Clairin World Championship. Créé afin de tisser des liens entre la culture haïtienne et la scène internationale de la mixologie, ce championnat du monde du clairin propose chaque année à ses participants de voyager le long des routes de Haïti, dans une expédition initiatique qui les mène jusqu’à la ville de Jacmel pour la grande finale. Le périple de cette année s’est clos de manière très particulière, puisque chaque finaliste et accompagnateur ont eu l’extrême privilège de déguster les tout premiers clairins vieillis et de sélectionner son propre fût. Baptisé clairin Ansyen, c’est une gamme de dix single casks qui verront ainsi le jour, vieilli de 19 à 27 mois dans des anciens fûts de Caroni et de whisky. Et alors que les clairins de Casimir et Vaval ont la faveur des fûts de whisky, celui de Sajous semble plus particulièrement réussir aux notes d’hydrocarbures emprisonnées dans les barriques de Caroni. Énième clin d’œil à Haïti et plus particulièrement à la ville de Jacmel, chaque étiquette représente une photo de masque en papier mâché dessiné par des artisans locaux, véritables acteurs d’une tradition séculaire qui contribue à la renommée mondiale de son carnaval. Parmi les single casks sélectionnés, Daniele Biondi, bras droit de Luca Gargano et figure emblématique de Velier, a sélectionné un clairin produit par Michel Sajous en 2016 et qui a passé 19 mois dans un ancien fût de Caroni (le fût #CARSA4). Mis en fût le 7 juin 2016 et embouteillé en janvier 2018 à 54,6 % et à 246 exemplaires, ce rhum artisanal arbore un aspect épicé (gingembre) et fruité ainsi qu’une touche pétrolière furtive.

Par Cyril Weglarz

Clairin 2015 Ansyen Sajous Single Cask (70 cl, 54,7%) : env. 63 €

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