Préparez votre voyage sur Islay, l’île des Hébrides intérieures. Au menu, des distilleries mythiques, Bowmore, Ardbeg, Bruichladdich, de la tourbe, du vent, de l’iode et quelques magnifiques projets.
D’une superficie de 620 km2, Islay est la plus méridionale des îles des Hébrides intérieures et compte huit distilleries qui, pour l’amateur de whisky, représentent une sorte de Graal.
Si elle ne peut se prévaloir de majestueuses montagnes comme sur l’île de Skye, ni de plages de sable blanc comme celles de Harris, Islay offre des paysages doucement vallonnés, des plages dorées balayées par le vent et un bras de mer, le Loch Indaal, qui sépare Bowmore de Port Charlotte et Bruichladdich. Autant de panoramas qui invitent à la contemplation en dégustant, installé au bord du rivage par une journée ensoleillée, un dram de la collection de plus de sept cents whiskies du Bowmore Hotel.
En planifiant bien votre séjour, la visite des distilleries de cette île compacte peut se faire en seulement quelques jours.
Parcours tourbés
Visiter les distilleries d’Islay est une affaire sérieuse, il est recommandé de réserver très à l’avance. Comptez deux jours pour visiter le trinôme Ardbeg/Laphroaig/Lagavulin sur la côte sud-est de l’île, en consacrant une journée entière à Laphroaig, et une autre à Ardbeg et Lagavulin.
La visite Water to Whisky [De l’eau au whisky] chez Laphroaig est l’une des plus remarquables expériences que l’on puisse vivre dans une distillerie. Vous aurez notamment la possibilité de retourner l’orge sur l’aire de maltage, puis de jeter un œil dans les tourailles. Je n’oublierai jamais ce que j’ai ressenti en posant le pied à l’intérieur de la touraille tandis que la fumée de tourbe montait en étranges volutes au-dessus de la grille sur laquelle je marchais. Après un pique-nique à proximité de la source, vous vous essaierez au bêchage de la tourbe, plus difficile qu’il n’y paraît, et au remplissage d’un flacon d’échantillon puisé directement au fût.
Le lendemain, la visite de la distillerie Lagavulin débute dès 10h30 dans les chais, avec un cours sur les effets du vieillissement sous bois, souvent dispensé par Iain MacArthur, légende vivante de la maison, qui pour illustrer son propos puise directement dans les fûts des échantillons de plus en plus âgés.
Puis vous emprunterez un chemin pittoresque et sans difficulté, sur un peu moins de deux kilomètres, longeant la côte vers le nord en direction de la plus belle distillerie de l’île, Ardbeg, et son très accueillant Old Kiln Café. La visite la plus technique, Deconstructing the Dram [déconstruction d’un verre], s’achève ici par une dégustation organisée dans le chai n°3.
Offrez vous, si possible, une nuit au Seaview Cottage, sur le site même de la distillerie. Toute proche de la maison de Mickey Heads, le directeur de l’établissement, cette élégante habitation offre un magnifique panorama sur la côte. Vous pourrez vous y faire livrer fruits de mer, homards et autres crabes par Boo et Ishbel, à condition d’avoir passé commande la veille.
Bowmore, capitale
Au troisième jour, rendez-vous à Bowmore, la capitale d’Islay, et descendez à l’Harbour Inn, hôtel racheté en 2014 et récemment rénové par la distillerie Bowmore. La carte du restaurant est celle d’une brasserie classique, proposant viandes et poissons de grande qualité. La visite de la distillerie, de l’autre côté de la rue, débute à 9h45 pour le Craftsman’s Tour, dont le temps fort est la dégustation de deux whiskies puisés directement au fût dans le chai n°1.
Prenez ensuite la route pour remonter vers le nord jusqu’à Islay House Square, un ensemble de demeures abritant boutiques et galeries, mais aussi le brasseur de l’île, Islay Ales, pour y faire quelques emplettes, puis longez la côte jusqu’aux lettres peintes sur des fûts, au bord de la route, indiquant Bruichladdich.
En visitant l’établissement, vous découvrirez ses fabuleuses installations anciennes, et notamment sa remarquable cuve-matière datant de l’époque victorienne, de style steampunk retro-futuriste. À la boutique, vous aurez la possibilité de remplir vos bouteilles aux deux fûts, ou valinches, mis à votre disposition.
Machir Bay
Direction maintenant Machir Bay, sur la côte ouest, pour une balade sur deux kilomètres de plage de sable doré, avant de visiter Kilchoman Distillery, la plus petite distillerie de l’île. Tout y est fait sur place, y compris le retournement de l’orge à la main sur le sol de la malterie. Déjeunez au café de la distillerie avant de retraverser l’île d’ouest en est jusqu’à Caol Ila et Bunnahabhain.
Si Caol Ila n’est pas le plus séduisant des établissements, la vue sur les Paps of Jura, de l’autre côté du Sound of Islay, mérite le détour. La visite Premium Tasting débute à 14h et se conclut par la dégustation de cinq whiskies dans l’enceinte de l’ancienne tonnellerie de la plus grande distillerie de l’île.
Bunnahabhain, un site de toute beauté, est la dernière étape de notre tournée. La visite Manager’s Tour est menée, lorsqu’il est disponible, par le directeur en personne, Andrew Brown, près de trente ans de maison.
Et le tour ne serait pas complet sans une visite des sites de Ardnahoe et la mythique Port Ellen prévue pour reprendre la production en 2020.
Par Laura Foster
Infos pratiques
Comment s’y rendre
Par avion : Logan Air propose des vols directs pour Islay au départ de l’aéroport international de Glasgow. Durée du vol 45 minutes.
Par ferry : La compagnie Caledonian MacBrayne dessert les Hébrides. Au départ d’Écosse continentale, prendre le ferry Oban-Port Askaig (3 heures 45 de traversée), ou la ligne Kennacraig-Port Ellen (2 heures 20).
calmac.co.uk
Se déplacer dans l’île
Location de voiture : D & N Mackenzie (carhireonislay.co.uk) et Islay Car Hire (islaycarhire.com).
Bus : peu fréquents et ne roulent pas le dimanche.
Taxis : le moyen de transport le plus recommandé si vous comptez déguster du whisky, à réserver très en avance.
islayinfo.com/travel.html
Quand partir
Durant les mois d’été, le temps est plus clément, les horaires d’ouverture plus larges et davantage d’animations sont proposées.
Où loger
Harbour Inn, Bowmore
bowmore.com/harbour-inn
Seaview Cottage
ardbeg.com/visit-us/seaview-cottage
Où se restaurer
Boo et Ishbel
07766 996360 (Boo) 07795 231826 (Ishbel)
Lochindaal Hotel
lochindaalhotel.co.uk
Port Charlotte Hotel
portcharlottehotel.co.uk
Bowmore Hotel
bowmorehotel.co.uk
Les événements à ne pas manquer
Feis Ile
Pour ce festival de printemps, les distilleries de l’île ouvrent leurs portes au public, chacune proposant une journée d’animations spéciales, avec dégustations, ceilidhs [danses folkloriques] et autres événements culturels.
Du 24 mai au 1er juin 2019
www.islayfestival.com
Semi-marathon d’Islay
Cette course de 13 miles [21 kilomètres] a lieu traditionnellement fin juillet, en terrain montagneux, avec un dram d’Ardbeg 10 ans d’âge offert à l’arrivée dans la salle des fêtes de Bowmore.
islayhalfmarathon.co.uk
Lagavulin Islay Jazz Festival
Le rendez-vous jazzy et malté, avec des concerts donnés un peu partout sur l’île, y compris dans plusieurs distilleries, durant un week-end du mois de septembre (dates non encore communiquées, ndlr).
islayjazzfestival.co.uk
Pour plus d’information
Bowmore iCentre : Tél. 01496 810254
Isaly à tout prix !
Ardbeg Corryvreckan
(70 cl, 57,1%)
Nez : Médicamenteux, sous l’influence de la tourbe. Antiseptique au TCP et algues entrent en jeu. Une note verte, houblonnée, de brassage de bière se manifeste quelque part à l’arrière-plan.
Bouche : Orange confite au premier plan, précédant un feu ronflant sur les papilles, avant qu’on ne jette dessus une pelletée de sel pour l’éteindre.
Finale : Comme lécher un morceau de charbon salé et le faire descendre avec un juteux bonbon gélifié à l’orange. C’est du bon, vous pouvez me croire.
Port Ellen 37 ans (Diageo Special Releases 2016)
(70 cl, 55,2%)
Nez : Relativement frais. Brise marine, abricots et un caractère de pin vert. Des morceaux de bois carbonisé subsistent dans la grille de foyer tandis que cuit une génoise à la mélasse et que l’on chauffe la crème anglaise qui l’accompagnera.
Bouche : La suave génoise à la mélasse est rapidement supplantée par une note de viande de bœuf séchée saupoudrée d’éclats de piment séché et d’effluves de charbon de bois. Le troisième acte met en scène anis anesthésiant, zeste de citron et sel de mer, avec davantage de piment. Une véritable expédition aromatique.
Finale : Cuir, citron, vanille, pin et anis. Extraordinaire de complexité.
Caol Ila 17 ans Unpeated (Diageo Special Releases 2015)
(70 cl, 55,9%)
Nez : Gâteau au gingembre confit et génoise, tandis qu’un coup de vent frais apporte une note acidulée d’algues. Une pointe d’huile essentielle de citron relève le tout.
Bouche : Outre une légère texture cireuse, un caractère distinct de poire et de cannelle se manifeste, de même que le gâteau au gingembre, avant que des embruns marins ne fouettent les papilles avec un murmure de fumée s’effilochant à l’arrière-plan.
Finale : Se prolonge sur la céréale et le soupçon de fumée.
Lagavulin 8 ans
(70 cl, 48%)
Nez : Réconfortant. Les braises mourantes d’un feu de charbon dissimulent d’abord un cœur de pêche et d’abricot, le tout enveloppé de bandages.
Bouche : Note très suave de fumée. Herbe sèche et bruyère, miel et sel de mer. Fraîche et légère, mais regorgeant d’arômes et de saveurs.
Finale : Longue et persistante, salée mais suave.
Laphroaig Lore
(70 cl, 48%)
Nez : Bonjour, Monsieur Créosote. Flocons d’avoine chauds et une note vive de pamplemousse rose cèdent place à une note un peu fétide de banane et d’ananas.
Bouche : La texture soyeuse initiale devient plus mâcheuse. Un séduisant mélange d’oranges juteuses, goudron et charbon, fondant praliné à la vanille, barre d’avoine aux amandes et miel, avec une minéralité de coquillage marin.
Finale : Goudron frais saupoudré de vanille.