Skip to main content

Reprise l’été dernier par trois passionnés, Julien Vandromme, Stanislas Thierry et Nicolas Lombard (Nusbaumer), la Maison Louis Roque célèbre l’anniversaire de la Vieille Prune de Souillac, une recette inchangée depuis 120 ans. L’occasion de revenir sur les raisons d’un succès et l’avenir d’une vieille et belle Maison.

Contrairement à ce que l’on croit souvent, Louis Roque n’est pas une distillerie. Quelle est la réalité derrière cette confusion ?

Nicolas Lombard : C’est un malentendu fréquent. Louis Roque n’a jamais distillé. Il ne s’agit pas d’une distillerie à proprement parler, mais d’une maison qui fonctionne un peu à la manière de certaines maisons de cognac. Comme elles, Louis Roque ne produit pas ses eaux-de-vie : elle les sélectionne, les vieillit, puis les assemble. On parle ici d’un modèle fondé sur le sourcing, le vieillissement et l’assemblage. Le triptyque fondateur du style Roque. La maison achète 80 à 90 % de ses volumes à des distilleries disséminées dans toute la France. Le choix des lots, leur qualité, leur typicité : tout cela est déterminant pour assurer la cohérence gustative de la gamme.

Quels sont les piliers du savoir-faire Louis Roque ?

NL : D’abord, le sourcing. La maison sélectionne avec exigence des lots issus de diverses distilleries artisanales. Ensuite vient le vieillissement, dans des fûts ou foudres, selon des durées variant de deux à dix ans en fonction des cuvées. Enfin, l’assemblage : c’est ici que la patte Louis Roque s’exprime pleinement. La vieille prune emblématique de la maison ne se limite pas à une seule variété de fruits. Elle résulte d’une recette singulière, combinant trois types de prunes : prune de ferme, mirabelle et quetsche. Une complexité qui confère à l’eau-de-vie une signature aromatique unique.

La vieille prune Louis Roque jouit d’une réputation d’initiés. Comment expliquez-vous ce statut un peu à part ?

NL : C’est une marque culte dans certains cercles, très respectée des amateurs. Beaucoup la considèrent comme une référence ultime. Et en même temps, elle traîne une image un peu vieillotte, à mille lieues des tendances actuelles. Mais attention : ce n’est pas ringard. Il y a quelque chose d’un peu intemporel, de profondément enraciné. Le défi, c’est d’assumer cet héritage tout en insufflant une nouvelle énergie. Trouver un équilibre entre fidélité au passé et ouverture à de nouveaux usages.

Comment redonner du souffle à une vieille maison sans altérer son identité ?

NL : Nous allons travailler main dans la main avec le monde gastronomique. Louis Roque est déjà très présent dans les bonnes tables de France, des étoilés aux bistrots. On veut aller plus loin, en collaborant avec des chefs qui revisitent les plats français traditionnels avec une approche contemporaine. Autre piste : les cocktails. Il ne s’agit pas de dénaturer le produit, mais de l’explorer dans de nouveaux formats. Certains essais en highball sont très convaincants. Cela permet d’élargir les usages, sans toucher à la recette.

Y a-t-il des projets de nouvelles cuvées ou d’innovation dans la gamme ?

NL : Oui, plusieurs. Nous envisageons de lancer une quatrième cuvée basée sur un principe de réserve perpétuelle, inspirée du système solera, comme on le voit en Champagne ou dans le Porto. Cela permettrait d’apporter plus de continuité, de complexité, tout en valorisant un stock ancien. Nous réfléchissons aussi à une édition spéciale pour les 120 ans de la maison. Mais rien n’est encore arrêté. Il faut identifier les bons lots, construire le bon assemblage. Ce type de projet demande du temps, de la patience, de la justesse.

Leave a Reply

Inscrivez-vous à notre newsletter